Tisser des liens entre l’expertise autochtone et la science occidentale dans la conception de vêtements pour l’Arctique

- St. John’s, Terre-Neuve-et-Labrador

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Dans l’Arctique canadien, où les températures dépassent rarement 0 °C et peuvent descendre jusqu’à −70 °C, rester au chaud est une priorité pour toutes les personnes qui y vivent et y travaillent. Les vêtements fabriqués en usine ne protègent pas toujours bien contre les gelures et l’hypothermie, mais au fil des siècles, les peuples autochtones ont confectionné des vêtements douillets pour lutter contre les éléments en utilisant des matériaux naturels tels que la peau de phoque, le duvet d’eider et le qiviut (fibres de laine de bœuf musqué).

Ces ressources renouvelables possèdent des qualités d’isolation thermique exceptionnelles, en plus d’être biodégradables. Elles ont ainsi un effet beaucoup moins important sur les décharges et les océans que les textiles synthétiques à base de plastique comme le polyester, qui sont devenus une grande menace pour l’environnement.

Une étude récente menée par le Centre de recherche en génie océanique, côtier et fluvial du CNRC dans le cadre du programme Défi « L’Arctique et le Nord » a permis de recueillir des données précieuses sur le degré de protection contre le froid des vêtements de fabrication autochtone, et d’examiner les moyens d’augmenter la production de ces vêtements afin qu’ils puissent être utilisés par les personnes travaillant dans des milieux arctiques — équipes de recherche, personnel d’entretien, pilotes, voyagistes, personnel militaire, gardes-côtes, etc .

Le CNRC a travaillé en collaboration avec 10 partenaires, dont Parcs Canada, le Craft Council of Newfoundland and Labrador (Conseil de l’artisanat de Terre-Neuve-et-Labrador) (en anglais seulement) et l’Institut de recherche du Collège Aurora (en anglais seulement), ainsi qu’avec 14 artisans pour étudier la possibilité d’utiliser des vêtements fabriqués à partir de matériaux naturels qui non seulement protègent mieux du froid au quotidien, mais peuvent aussi aider les personnes qui les portent à survivre en cas d’urgence.

« Nos résultats confirment que les vêtements confectionnés par des Autochtones ont des valeurs d’isolation thermique très élevées », illustre Anne Barker, directrice du programme Défi « L’Arctique et le Nord » du CNRC. « Par exemple, un ensemble complet permettrait à une personne physiquement active de rester au chaud quand la température ambiante est de −60 °C». De plus, ces vêtements répondraient aux exigences techniques courantes du gouvernement du Canada concernant les équipements de protection individuelle (EPI), voire les dépasseraient.

Un mélange de savoirs – des vêtements purement canadiens

Jonathan Power, agent du Conseil de recherches au Centre de recherche en génie océanique, côtier et fluvial du CNRC explique que les premiers essais de mesure thermique effectués au laboratoire du CNRC à St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador) ont permis de comparer des vêtements ordinaires à des vêtements de fabrication autochtone. « À l’aide de technologies et d’outils tels qu’un mannequin thermique (NEMO), nous avons mesuré et comparé le niveau d’isolation fourni par des pièces de vêtement individuelles et des ensembles complets. »

L’équipe de recherche a fait porter à NEMO des vêtements d’extérieur pour le haut et le bas du corps (parkas et pantalons), pour les mains (mitaines), pour les pieds (bottes et chaussettes) et pour la tête. Les résultats des essais effectués avec des vêtements d’extérieur ont montré que les ensembles de fabrication exclusivement autochtone présentaient les valeurs d’isolation les plus élevées. Par exemple, les vêtements pour les mains confectionnés par des artisans autochtones pouvaient prévenir les gelures à une température ambiante de −30 °C. Les vêtements pour les pieds de fabrication autochtone permettaient d’accroître l’isolation thermique de 12 % à 23 %, tandis que les vêtements pour la tête et le cou nécessitaient moins d’énergie de la part de NEMO pour se maintenir au chaud.

« Nos partenaires ont contribué à notre étude au moyen de connaissances locales et autochtones », ajoute Anne Barker. Celles-ci ont notamment permis de déterminer les types de vêtements à évaluer, d’obtenir de l’information sur les artisans autochtones et de cerner les défis à relever.

Un partenariat en évolution

Constatant la valeur évidente des travaux de recherche menés pour répondre aux besoins quotidiens de leur personnel ainsi que l’intérêt que représentent des vêtements améliorés, plusieurs ministères et organismes fédéraux ont offert du financement et d’autres formes de soutien, ce qui a permis d’accroître l’efficacité de la recherche et d'en extraire plus facilement des applications pratiques.

Les uniformes vert forêt du personnel de Parcs Canada faisaient partie des articles mis à l’essai. « L’expertise du CNRC en matière de méthodologie de recherche a été essentielle à la réussite du projet, explique Stéphanie Sirois, responsable de la marque. Nous savions que les résultats nous aideraient à répondre aux besoins en matière de santé et sécurité au travail et à favoriser la réconciliation avec les peuples autochtones. » Elle souligne d’ailleurs que la plupart des membres du personnel de Parcs Canada dans le Grand Nord sont des Autochtones et que leur permettre de porter des vêtements familiers et confortables est une reconnaissance importante de leur savoir-faire ancestral pour se protéger contre les éléments.

Ces recherches ont également permis à Parcs Canada d’aider les fournisseurs autochtones à adapter leurs vêtements aux spécifications d’achat du gouvernement, afin qu’ils puissent être plus concurrentiels et assurer une meilleure uniformité de leurs produits. Dans le cadre du projet, le Craft Council of Newfoundland and Labrador a contribué à trouver de nombreux producteurs de vêtements et à établir des relations avec des partenaires de la communauté de l’artisanat.

Selon Rowena House, directrice générale du Craft Council, l’initiative ouvre une voie d’accès importante à de nouveaux canaux de vente et aidera à fabriquer des articles qui sont scientifiquement éprouvés et répondent aux critères de divers ministères en matière d’ EPI.

« À terme, le projet apportera aux artisans de meilleurs débouchés pour faire croître leurs activités, étendre leur marché à de nouvelles régions et vendre à d’autres groupes démographiques, affirme-t-elle. À long terme, nous considérons qu’il s’agit d’une source de revenus stable et durable pour de nombreux producteurs. »

Pour de plus amples renseignements, consultez le rapport de recherche Thermal Evaluation of Government of Canada Cold Weather Clothing and Indigenous Garments (Évaluation thermique des vêtements de protection contre le froid du gouvernement du Canada et des vêtements de fabrication autochtone – en anglais seulement)

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