Le Conseil national des recherches du Canada innove pour créer des immunothérapies du cancer.
Des Canadiennes et Canadiens atteints d'une leucémie lymphocytaire chronique (leucémie à cellules B) ou d'un lymphome agressif qui ne répondent pas bien aux traitements actuels peuvent maintenant avoir un nouvel espoir. En effet, plus tard cette année, ces patients pourront participer aux essais cliniques d'une nouvelle immunothérapie mise au point par le Conseil national de recherches du Canada (CNRC).
L'immunothérapie, traitement qui exploite les cellules immunitaires de l'organisme pour combattre les cellules cancéreuses, a donné des résultats prometteurs, tout en étant beaucoup moins toxique que les traitements actuels. Ce type de thérapie a aidé de nombreuses personnes et est maintenant utilisé pour traiter divers types de cancers.
Thérapies par lymphocytes T à récepteur antigénique chimérique (CAR-T)
La thérapie cellulaire CAR-T est une nouvelle forme d'immunothérapie très efficace et novatrice, qui consiste à filtrer les globules blancs du sang d'une personne, à y introduire un gène synthétique et à lui réinjecter les cellules ainsi améliorées.
Cette thérapie fait appel à des globules blancs particuliers, les lymphocytes T, qui ont la capacité de traquer les cellules infectées ou cancéreuses dans l'organisme et de les détruire. Lorsque les cellules T sont modifiées par un récepteur d'antigène chimérique, elles deviennent des cellules CAR-T et acquièrent de nouveaux moyens de lutter contre le cancer.
Le gène CAR spécial qui est ajouté aux cellules T code une molécule d'anticorps qui permet aux cellules CAR-T de reconnaître et de se lier à une protéine précise à la surface des cellules cancéreuses pour ainsi les tuer, tout en épargnant les cellules saines. Cette sélectivité rend les traitements CAR-T beaucoup plus efficaces et présente moins d'effets secondaires que la chimiothérapie.
Des milliers de patients du monde entier, atteints de formes de leucémie et de lymphome auparavant incurables, ont désormais tiré parti d'un type d'une thérapie CAR-T. Il s'agit de la thérapie CAR-T CD19. Dans ce traitement, les cellules CAR-T sont dotées d'un anticorps qui reconnaît et cible la protéine « CD19 » présente dans certains types de cancer du sang. La majorité des patients ont bien répondu à la thérapie CAR-T CD19 et beaucoup ont même été guéris.
La thérapie cellulaire CAR-T exclusive du CNRC
« Nous avons trouvé de nouvelles façons de déterminer rapidement les anticorps pour développer la prochaine génération de thérapies CAR-T », indique Risini Weeratna, directrice intérimaire du programme Défi « Technologies de rupture au service des thérapies cellulaires et géniques » du Centre de recherche en thérapeutique en santé humaine (TSH) du CNRC.
Mehdi Arbabi-Ghahroudi, chercheur au CNRC, a découvert et caractérisé un anticorps unique en son genre qui cible la protéine CD22, un élément essentiel à la thérapie par CAR-T du CNRC. « Ce tout nouveau type d'anticorps modifié à domaine unique, aussi appelé nanocorps, possède des propriétés supérieures à celles des fragments d'anticorps conventionnels », explique M. Arbabi-Ghahroudi. « Grâce à cet anticorps, l'équipe de recherche du CNRC a pu créer une nouvelle cellule CAR-T fabriquée au Canada qui peut détecter la protéine CD22 sur les cellules de leucémie à cellules B et de lymphome. »
C'est grâce à sa capacité à cibler la protéine CD22 que la thérapie CAR-T peut fonctionner lorsque les traitements ciblant d'autres protéines du cancer, par exemple la protéine CD19, s'avèrent inefficaces. Cela offre une autre chance aux patients pédiatriques et adultes en rechute atteints de certains cancers du sang d'obtenir une réponse efficace.
« Il s'agit de la première thérapie CAR-T conçue et mise au point par le CNRC, et nous collaborons avec une équipe de scientifiques canadiens du milieu universitaire et de la recherche clinique pour la faire passer aux essais cliniques en 2024 », ajoute Mme Weeratna.
La thérapie CAR-T CD22 du CNRC fera l'objet d'essais cliniques à la fin de cette année à Vancouver, à Ottawa et à Toronto. Deux essais seront menés simultanément : l'un axé sur la leucémie lymphoblastique de l'enfant et de l'adulte, l'autre sur le lymphome.
Les essais cliniques feront partie du programme CLIC (Canadian-Led Immunotherapies in Cancer [en anglais seulement]) fondé par des chercheurs de l'Hôpital d'Ottawa, de BC Cancer et de BioCanRx.
Le modèle de fabrication du CNRC fait renaître l'espoir
Le Secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques a approuvé 6 thérapies CAR-T, la totalité pour le traitement des cancers du sang. Bien que 4 d'entre elles aient également été approuvées par Santé Canada, ces thérapies coûtent cher et ne sont pas toutes remboursées par les régimes provinciaux d'assurance-maladie. Par conséquent, les patients canadiens ont un accès très limité à ces thérapies. De plus, toutes ces thérapies sont fabriquées à l'étranger et les délais d'attente pour y avoir accès sont longs, et le temps est une chose dont la plupart des patients atteints de cancer ne disposent pas.
« De par nos recherches, nous visons à offrir des thérapies CAR-T qui sont plus abordables et plus accessibles, explique Scott McComb (Ph. D.), scientifique et chef du projet de développement de la thérapie CAR-T CD22 au CNRC. Il ne sert à rien de fabriquer de nouvelles thérapies sophistiquées si les Canadiennes et Canadiens ne peuvent pas en profiter. »
Il précise que le CNRC travaille avec un consortium de chercheurs canadiens à l'établissement d'une série d'installations de biofabrication d'un bout à l'autre du pays pour la confection de produits CAR-T cliniques selon les bonnes pratiques de fabrication. Par ailleurs, le fait de disposer de cette capacité dans les hôpitaux et les cliniques pourrait constituer une solution de rechange intéressante pour l'administration plus directe et moins coûteuse de ces thérapies une fois qu'elles auront été approuvées. Chaque installation serait en mesure d'extraire et de modifier sur place les cellules T des patients afin de concevoir des thérapies CAR-T personnalisées.
L'un des principaux facteurs de réussite de ces recherches est le programme Défi « Technologies de rupture au service des thérapies cellulaires et géniques », dirigé par Mme Weeratna. Ce programme axé sur une mission fournit des fonds ciblés aux scientifiques du Canada pour qu'ils et elles collaborent avec les chercheurs du CNRC dans le but ambitieux de créer pour la population canadienne des thérapies cellulaires et géniques accessibles et abordables.
« Ce programme Défi a révolutionné notre capacité à offrir ces thérapies au Canada, signale Mme Weeratna. Non seulement nous innovons, mais nous contribuons également à établir tout un écosystème autour de la thérapie cellulaire et génique. » Ainsi, si les nouvelles thérapies s'avèrent sûres et efficaces lors des essais cliniques, elles seront plus largement disponibles au Canada, sans le coût élevé des thérapies CAR-T actuellement sur le marché.
Faire fond sur de solides antécédents
Dans le domaine des biothérapeutiques, le CNRC travaille depuis longtemps sur l'identification de nouveaux antigènes et de nouvelles séquences d'anticorps, ainsi que sur leur modification et leur transformation en vaccins ou en médicaments à base d'anticorps. Au début des années 1980, les chercheurs du CNRC ont également mis au point le premier vaccin contre la méningite, qui a contribué à sauver d'innombrables vies en prévenant cette maladie bactérienne grave et souvent mortelle. Plus tard, le CNRC a créé le premier gène synthétique de proinsuline humaine au monde, qui est aujourd'hui à la base du médicament utilisé par la quasi-totalité des diabétiques insulinodépendants.
« Nous avons amalgamé les connaissances collectives du CNRC sur la biologie fondamentale des cellules immunitaires et notre savoir-faire dans la production d'anticorps pour créer cette nouvelle thérapie CAR-T de fabrication canadienne, ajoute M. McComb. Ce que nous apprenons de nos recherches sur la leucémie et le lymphome nous aidera aussi à créer des thérapies révolutionnaires pour d'autres maladies comme le cancer du cerveau, du pancréas et du poumon. »
Le rôle de premier plan que joue le CNRC pour faire passer la thérapie CAR-T du laboratoire à la clinique s'appuie sur ce leadership. Mme Weeratna résume l'avenir passionnant qui attend le CNRC dans le domaine des thérapies cellulaires CAR-T : « Grâce à notre réseau de collaboration avec des partenaires cliniques et industriels, nous pouvons poursuivre la tradition qui consiste à réunir tous les éléments essentiels pour apporter un véritable changement dans la façon dont nous traitons le cancer au Canada. »
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