Une minuscule reproduction du tableau le plus célèbre au monde révolutionne le prototypage

- Edmonton, Alberta

La Joconde de Léonard de Vinci, une des œuvres les plus connues de la planète, est exposée au Louvre depuis 1804. Bien qu'il mesure 77 centimètres sur 53 centimètres (30 x 20 pouces), ce portrait en couleur, réalisé à la main, a été reproduit en millions d'exemplaires de toute taille, pour le plaisir des amateurs d'art du monde entier.

Cet automne, les laboratoires du Conseil national de recherches du Canada (CNRC) à Edmonton ont reçu le NanoFrazor, un puissant outil de nanomodélisation, et l'expert qui en a assuré l'installation s'en est servi pour créer, en l'espace d'à peine 4 minutes, une réplique de la Joconde si minuscule qu'un grain de sel en contiendrait 1,4 million d'exemplaires! L'image en relief ne mesurait en effet que 16 micromètres par 12, soit environ 0,0016 par 0,0012 centimètre, dans une gamme de gris de 100 nanomètres de profondeur. Cette étonnante démonstration n'est toutefois qu'un exemple de ce que peut réaliser cet outil, appelé à révolutionner le prototypage en recherche-développement.

Avec l'arrivée au pays du premier NanoFrazor suisse, cet été, les scientifiques du Centre de recherche en nanotechnologie du CRNC et leurs collaborateurs de l'Université de l'Alberta à Edmonton disposent désormais d'une nouvelle technologie de rupture qui accélérera leurs travaux de pionnier sur le branchement du monde macroscopique à l'univers de l'atome.

Selon Mark Salomons, chef de l'équipe en microscopie appliquée au développement et à l'analyse du CNRC, le NanoFrazor épargnera énormément de temps et d'argent aux chercheurs. « Un lithographe à faisceau électronique ordinaire trace des lignes de 50 nanomètres de largeur, mais prend 10 fois plus de temps à fabriquer un échantillon, explique-t-il. En plus d'éliminer maintes étapes dans le processus, le NanoFrazor n'a pas besoin de les répéter. » L'appareil cisèle un modèle tridimensionnel dans une plaquette de polymère déformable d'à peine 10 nanomètres de largeur.

L'équipe de la microscopie appliquée au développement et à l'analyse manipule l'atome pour concevoir les minuscules circuits qui animent les téléphones intelligents, par exemple. « Certes, il est possible de créer des circuits cent fois plus petits, mas la difficulté consiste à les connecter et à les tester », explique M. Salomons. « Le nouvel appareil permet de raccorder les atomes à des fils en vue d'une application très concrète. » Le NanoFrazor autorise aussi le contraire : aller du plus petit au plus grand. Enfin, cette technologie à l'échelle de l'atome s'avère d'une rare efficacité, car elle ne consomme qu'une infime quantité d'énergie, une considération majeure dans la lutte contre le changement climatique dont le gouvernement canadien a fait une priorité.

La lithographie par sonde à balayage thermique

Le NanoFrazor recourt à la lithographie par sonde à balayage thermique, première solution de rechange véritable à la lithographie par faisceau d'électrons. « Avec la précision qui a fait la renommée de la Suisse, l'appareil trace et inspecte simultanément des nanostructures complexes avec une sonde chauffante extrêmement acérée. La pointe thermique détaille des nanostructures arbitraires à haute résolution en sublimant localement le bouche-pores (le polymère avec lequel on modélise par couches un échantillon). L'appareil n'écarte pas pour autant les méthodes classiques de transfert du patron que sont le décollement ou la gravure.

Le CNRC ne se borne à développer des technologies fondées sur le NanoFrazor. M. Salomons insiste sur ce point. Il élabore l'architecture qui en permettra l'exploitation. « Nous jetons les bases de la fabrication à l'échelle de l'atome, affirme-t-il. Nous ne concevons donc pas qu'une application, mais un nouveau “moteur” qui conviendra à toutes sortes de véhicules. »

Le NanoFrazor en action

Cet outil ultramoderne n'est que l'illustration la plus récente des retombées du partenariat en recherche-développement que le Centre de recherche en nanotechnologie du CNRC entretient depuis longtemps avec l'Université de l'Alberta, ramenée à la dimension de l'atome. Une collaboration qui fait progresser la connexion entre les mondes atomique et macroscopique, mais aussi la fabrication de capteurs et d'autres composants électroniques à l'échelle atomique. Résultat? Une meilleure performance et une consommation d'énergie nettement plus faible que les dispositifs de plus grande taille correspondants, 2 atouts d'une immense valeur sur le plan commercial.

Grâce à un nouveau projet conjoint en nanotechnologie piloté par Jason Pitters, du CNRC, et Robert Wolkow, de l'Université de l'Alberta, l'équipe utilise le NanoFrazor dans des travaux susceptibles de faire entrer la nanofabrication dans une ère nouvelle. Pour y arriver, on devra raccorder fils et commandes aux circuits atomiques en concevant une carte-mère à laquelle seront branchés les composants électroniques. Le NanoFrazor établit de telles connexions beaucoup plus vite que les technologies actuelles, car toutes les étapes sont réunies dans le même appareil, y compris l'imagerie du nouveau modèle.

D'autres projets du CNRC feront bon usage de la capacité du NanoFrazor à connecter les dispositifs de la taille de l'atome, notamment celui qui vise à créer des capteurs quantiques avec le concours des scientifiques de l'Université de Sherbrooke et de l'Université McGill. Le Centre de recherche en métrologie du CNRC et l'Université de l'Alberta coopèrent également à la conception de transistors électroniques de la taille de l'atome qui serviront d'étalons pour la température et le courant électrique.

Bien que l'application de la puissance du NanoRazor à la recherche à l'échelle atomique n'en soit qu'à ses débuts, on peut d'ores et déjà imaginer une foule d'applications, notamment en lien avec les téléphones cellulaires, les ordinateurs portables et les systèmes informatiques, qui consommeront des centaines de fois moins d'énergie que les modèles existants. Seul le temps nous dira jusqu'où ira cette nouvelle nanotechnologie.

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