Les chercheuses avec le Centre de recherche de la thérapeutique en santé humaine du CNRC. De gauche à droite : Risini Weeratna, Anna Jezierski, Kelley Parato, Danica Stanimirovic, Lakshmi Krishnan
Aussi vite que puisse progresser la technologie, une chose ne change pas : le poids qu'exerce la maladie sur une personne et ses proches. La maladie est aveugle; elle frappe les gens des deux sexes, sans distinction de la race ou de la grosseur du portefeuille. Pourtant, un nouveau type de traitement, communément appelé « thérapies cellulaires et géniques », accentue la segmentation entre les nantis et ceux qui le sont moins. En effet, avec son coût inabordable – souvent de l'ordre d'un demi-million de dollars la dose –, ce « remède » à la fine pointe de la science devient inaccessible.
Un nouveau programme du Conseil national de recherches du Canada (CNRC) a précisément pour but de trouver une solution à ce problème. Le programme Défi « Technologies de rupture au service des thérapies cellulaires et géniques » verra à la conception et au développement de nouvelles thérapies aussi abordables qu'accessibles, et ce, conçues au Canada.
« Pour élaborer un traitement d'avant-garde contre le cancer et les maladies génétiques, la collaboration est de mise », affirme Lakshmi Krishnan, directrice générale du Centre de recherche en thérapeutique en santé humaine du CNRC. « Avec nos partenaires du gouvernement, de l'industrie et des universités, nous ferons progresser et accélérer le développement de technologies dont on se servira pour élaborer les thérapies cellulaires et géniques destinées à la population canadienne. »
Des solutions technologiques révolutionnaires
Risini Weeratna élabore des thérapies contre le cancer au Centre de recherche en thérapeutique en santé humaine du CNRC.
« Les thérapies cellulaires et géniques sont essentiellement des thérapies de remplacement : au lieu de soigner les symptômes ou de maîtriser la maladie, on supprime le problème sous-jacent en corrigeant les gènes défectueux, en remplaçant les cellules défaillantes et en réparant les tissus abîmés », explique Kelley Parato, directrice du programme. « Ces traitements sont d'une complexité extrême, mais ils sont très efficaces. Malheureusement, ils sont aussi hors de prix pour l'instant. »
On peut soigner une maladie de diverses manières avec les thérapies cellulaires et géniques. Cependant, un problème que présentent actuellement ces dernières est qu'il faut les adapter au patient. D'où leur coût souvent exorbitant. Le traitement CAR-T, par exemple, suppose le prélèvement de lymphocytes T du patient, leur reconstruction en laboratoire et l'inoculation des cellules modifiées au patient.
« À dire vrai, nous apprenons au système immunitaire à vaincre le cancer », explique Risini Weeratna, responsable des activités du programme en thérapie cellulaire. « Évidemment, il faut le faire une personne à la fois. Les cellules du patient servent de point de départ. »
Développer une cellule donneuse « universelle » constituerait un pas important vers des thérapies cellulaires et géniques moins onéreuses. Les chercheurs du CNRC utiliseront des cellules souches pluripotentes induites (CSPi) pour créer les cellules à partir desquelles on élaborera un traitement pour des maladies et des troubles génétiques précis. Pareilles cellules seront « universelles » dans le sens où on n'aura pas besoin de les prélever chez le patient. Il y en aura déjà de « toutes prêtes ». En d'autres termes, le travail s'amorcera en laboratoire et non avec le malade. On modifiera les cellules pour qu'elles s'attaquent à un type spécifique de cancer ou à une maladie héréditaire sans que son système immunitaire naturel les rejette.
« Nous créons de nouveaux outils et recourons à l'intelligence artificielle pour modifier les CSPi et les rendre plus "furtives" », déclare Anna Jezierski, responsable de projet de l'axe « Ingénierie de précision » du programme. « Ces cellules exceptionnelles aideront les scientifiques à concevoir une panoplie de traitements prêts à l'emploi pour combattre le cancer et les maladies dégénératives. Nous voulons troquer l'approche "un patient à la fois" pour une autre qui autorisera de nombreux traitements, donc qui fera baisser nettement les coûts, rendant, par le fait même, la thérapie plus accessible et abordable ».
Installations de fabrication de dispositifs bioanalytiques du CNRC.
À plus long terme, les chercheurs souhaitent mettre au point des technologies pour des biodispositifs qui autoriseront une administration mieux répartie des thérapies cellulaires et géniques par la microfluidique.
« Imaginez un instrument portatif – disons une petite boîte – qui renfermerait de quoi fabriquer une thérapie cellulaire. Le système automatisé qui y serait intégré analyserait les résultats en permanence afin de garantir la qualité des soins. On disposerait d'une thérapie cellulaire pour le malade sur-le-champ », explique Lidija Malic, chercheuse au Centre de recherche sur les dispositifs médicaux du CNRC, à la tête du projet « Biodispositifs » du programme. « Cela ressemble à de la science-fiction, mais une telle technologie pourrait bien voir le jour dans quelques années. »
Preuve d'une réussite
Danica Stanimirovic parle de l'élaboration d'un meilleur traitement génique pour la déficience en LPL avec le concours de ses partenaires de l'Université de la Colombie-Britannique au bulletin d'information télévisé The National, sur la chaîne anglaise de Radio-Canada.
Pour bien jauger la situation, il suffit de songer au Glybera – première thérapie génique jamais offerte dans le monde. D'abord homologué en Europe, le médicament, qui devait soigner un problème héréditaire appelé « le déficit familial en lipoprotéine lipase » (LPL), coûtait un million de dollars la dose. Une seule dose a été vendue à prix régulier en Europe avant qu'on le retire du marché.
Dans le cadre de son programme Défi sur les thérapies cellulaires et géniques, le CNRC coopère avec des chercheurs de l'Université de la Colombie-Britannique pour élaborer une nouvelle version de la thérapie (en anglais seulement), non seulement plus efficace, mais aussi, qui se vendra éventuellement à une fraction du prix de l'original. Sachant qu'au départ la thérapie génique pour la déficience en LPL a vu le jour au pays, on peut dire qu'il s'agit d'un projet canadien sur toute la ligne.
« En un sens, nous rapatrions la technologie », déclare Danica Stanimirovic, qui pilote le projet. « La science à l'origine de la thérapie qui devait soigner la déficience en LPL trouve son origine au Canada, où elle a été testée avec succès. Mais les Canadiens n'ont jamais pu en profiter. Nous avons fermement l'intention d'y remédier. »
S'entraider pour la santé
Au bout du compte, leur détermination à améliorer la santé de leurs compatriotes est ce qui rapproche ces femmes.
« Soyons francs : développer de nouveaux traitements médicaux demande du temps », souligne Mme Krishnan. « Notre objectif est de raccourcir le développement partout où la chose est possible, de façon à alimenter l'innovation, sans négliger pour autant la sûreté et l'efficacité. Au labo, nous ne faisons que recueillir et analyser des données. Mais dans la vraie vie, c'est peut-être un frère, une sœur, un proche ou un être cher qui aura un jour besoin de ces soins. Nous tâchons de toujours garder en tête l'aspect humain du travail que nous effectuons. Cette perspective nous aide à redoubler d'efforts et à nous rapprocher d'une vraie solution. »
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